(L’auteur vivant aux Etats-Unis, il décrit ce qu’il y observe. A vous
de voir si la même description peut s’appliquer au paysage chrétien
francophone. NdT)
Les machines sont utilisées pour effectuer les
tâches difficiles ou répétitives, mieux et plus rapidement, et
permettre ainsi aux gens d’avoir plus de loisirs et de temps libre pour
faire d’autres choses en dehors de leur travail.
Un jour un groupe de gens remarquèrent qu’ils auraient bien besoin
d’une machine pour rendre les choses difficiles plus faciles à faire.
Ils se concertèrent et proposèrent une jolie petite machine appelée «
Religion ».
Ils se dirent que La Machine Religieuse allait rendre la vie plus
facile à tout le monde. Avec cette Machine, nous n’aurions pas besoin
de perdre un temps précieux à avoir des relations avec un Dieu qui nous
aime. Cette machine allait transformer ce processus complexe en un
processus en trois étapes très simples que tout le monde pourrait
suivre, et qui permettrait de réduire Dieu à une idéologie
impersonnelle faites de bonnes oeuvres. Le résultat fut la production
en masse de personnes religieuses qui pensaient, parlaient, agissaient
et croyaient toutes de la même manière.
Tout alla très bien pendant un certain temps. La Machine Religieuse
fonctionna conformément à ce qu’on attendait d’elle. Des églises furent
construites, des mouvements furent initiés, des croisades furent
tenues, des programmes furent lancés. Les inventeurs se félicitaient
d’avoir rendu la Religion si efficace.
Mais vous et moi savons que les machines demandent beaucoup
d’entretien. Il faut remplacer des pièces. Les gens souhaitaient que la
Machine devienne plus grosse, plus performante et plus rapide chaque
année. On engagea des dépenses pour la recherche et le développement,
pour les tests, pour le matériel et le stockage. La Machine Religieuse
nécessitait des personnes qualifiées pour s’en occuper, des personnes
qualifiées pour la faire fonctionner, et des personnes qualifiées pour
superviser les personnes qui la faisaient fonctionner, et ainsi de
suite.
Avec
toutes les améliorations et les modifications faites par rapport au
modèle d’origine, la Machine Religieuse devint si grosse que l’on dû la
loger quelque part; ils possédaient maintenant des usines avec tout ce
qui s’en suit: les propriétés, les équipements spécialisés, les besoins
en électricité et en eau, davantage d’employés, l’étude d’intendance,
les dirigeants, les mises à jours, les maintenances, et tous les coûts
non prévus qui y sont associés pour maintenir la Machine en état de
marche.
Personne ne savait quelle taille allait atteindre la Machine
Religieuse. Les inventeurs n’imaginèrent jamais que leur petite
invention se transformerait un jour en un gros business, mais c’est ce
qui arriva. Les gens déménagèrent avec leur famille pour vivre et
travailler près de leur Machine. Il y avait de l’argent là-bas, des
possibilités d’évolution, une occasion de s’établir, et un endroit
agréable où élever ses enfants. La Machine était un catalyseur pour
l’économie locale parce qu’elle produisait du travail et des biens.
C’était dans l’intérêt de tous de permettre à la Machine de continuer
de fonctionner.
Les gens étaient très fiers de leur travail. Faites un tour avec eux
n’importe où dans le pays et ils vous montreront les impressionnantes
rangées de bâtiments d’église, les séminaires tentaculaires, et les
méga-églises genre centre commerciaux. Ils disaient « Nous avons permis
que tout cela voit le jour ». « Merci à Dieu pour la Machine
Religieuse! Comment faisions-nous avant sans tout cela? »
Mais il y a un autre côté à l’histoire. Oh, le travail est assez
simple. « Faites ce que l’on vous dit. Poussez ce bouton, tirez ce
levier, tournez cet interrupteur. » Continuez de produire,
arrangez-vous pour que la machine continue de produire. Mais le coût
humain exigé de ceux qui font tourner la Machine n’est pas nul. Ils ne
sont qu’une partie d’un immense système, ils commencent par arrêter de
penser par eux-mêmes; ils dépendent de leur superviseur pour leur
dirent ce qu’ils doivent faire. Jour après jour, ils rentrent fatigués
à la maison (leur jour le plus fatiguant est le dimanche). Ils font
toujours des heures supplémentaires, et leur vie de famille est
inexistante. Ils pensent au travail même quand ils sont à la maison. Le
nom de ce jeu est « Production »; faire que la Machine continue de
fonctionner quoi qu’il arrive, produisez plus avec moins.
Les personnes sont presque toujours blessées à leur travail. C’est un
travail dur, difficile et bruyant. La Machine fait tellement de bruit
que tous les travailleurs finissent par perdre finalement leur ouie. La
lumière est si faible que les employés sont devenus myopes et ne
supportent plus la lumière du jour. Mais d’un autre côté, la sécurité
qui résulte du fait d’être payé chaque mois est plus importante que les
effets secondaires. Ainsi le travail peut continuer.
D’ailleurs à quel autre endroit pourraient-ils aller? Que
pourraient-ils faire d’autre? Grâce à leurs salaires, ils peuvent
subvenir à leurs engagements financiers: l’hypothèque de la maison,
l’achat de la voiture, et les charges. Si la machine arrête de
fonctionner, l’argent arrêtera de rentrer et cela signifiera la
banqueroute pour les employés et la communauté. C’est ainsi et c’est
comme cela que ça continue.
Ils sont augmentés de façon assez irrégulière. Certains vivent assez
longtemps pour partir en retraite, mais la plupart des travailleurs
meurent à cause du stress, sont blessés pendant le travail, sont mis
hors fonctions pour toujours ou font des crises de nerfs. Mais
qu’importe, la machine continue de tourner.
Mais ensuite l’inattendu arriva.
La Machine Religieuse utilisait une huile synthétique, faite par les
hommes, pour pouvoir fonctionner
L’huile commença à manquer. La Machine s’enraya.
Les travailleurs étaient paniqués. Plus d’huile? Comment la Machine
pourrait-elle continuer? Qu’allait devenir leur travail? Qui allait
s’occuper de leur famille?
« Ne pourrait-on pas prendre de l’huile naturelle? » demanda quelqu’un.
Non cela ne pourrait pas marcher. Ils ont déjà essayé il y bien des
années. La vraie huile ne peut pas faire fonctionner la Machine
Religieuse.
Les superviseurs s’énervaient et tempêtaient. Comment allaient-ils
faire redémarrer la Machine?
Il ne restait qu’une seule solution.
Les portes furent fermées à clé. Des gardes armées rassemblèrent les
ouvriers, et les alignèrent face à la partie supérieure de la chambre
de combustion, la fournaise qui faisait tourner la Machine Religieuse.
Ils furent jetés un par un dans le réservoir. La Machine fit des
étincelles et commença à vrombir de nouveau.
« Plus de gens! Nous avons besoin de plus de gens! » Comme des agneaux
que l’on emmène vers ceux qui vont les égorger, les travailleurs
sourds, aveugles et muets furent poussés dans le vide pour être
utilisés comme carburant pour la Machine Religieuse. Ensuite ce fut le
tour de leurs épouses, époux, enfants, parents, frères et soeurs, tous
furent jetés vivants en hurlant dans la Machine. Les maisons, les
voitures, les vêtements, les bijoux, les meubles et leurs possessions
furent confisqués et renversés dans la Machine Religieuse pour y servir
de carburant.
Au bout du compte, tout ce qui pouvait être utilisé comme carburant le
fut. Mais cela ne suffit pas et ne servit donc à rien. La Machine
Religieuse s’enraya à nouveau, et il ne resta personne pour la
redémarrer. Les superviseurs partirent dans les villages pour essayer
de recruter de nouveaux travailleurs, mais après avoir entendu ce qui
était arrivé, personne ne voulu accepter le travail.
Aujourd’hui ces superviseurs ont disparu et sont morts. La Machine
Religieuse fut démantelée par les gens de la ville, et ses débris
dispersés aux quatre vents, pour qu’elle ne soit plus jamais assemblée.
Le problème avec la Machine Religieuse était qu’elle débuta comme une
sympathique invention prévue pour aider les gens, mais elle finit par
les blesser. La Machine a été faite pour les hommes, mais bientôt les
hommes commencèrent à vivre pour la Machine et en devinrent dépendants.
Un jour un autre groupe de personnes remarquèrent qu’ils auraient bien
besoin d’une machine pour simplifier les choses difficiles. Ils étaient
même plus talentueux, plus avancés technologiquement, et plus influents
que le premier groupe d’inventeurs. Ils se concertèrent donc et
proposèrent une jolie petite machine appelée « Le Christianisme
américain »...